Multiple médaillée internationale, vice-championne olympique à Tokyo 2020 et championne du monde 2018 au sabre par équipe, Charlotte Lembach nous a fait le grand plaisir de répondre à notre interview Le sport et moi.
1. Pour commencer, pourrais-tu te présenter brièvement ?
Je m’appelle Charlotte Lembach, je pratique l’escrime depuis l’âge de 6 ans. Après avoir intégré l’équipe de France junior en 2004, j’ai rejoint l’équipe de France sénior en 2009 et je suis en dernière année de master option marketing à l’EDHEC business school.
2. Pourquoi avoir choisi ce sport et pas un autre ?
Le sport est venu à moi un peu par hasard lorsqu’à l’âge de 6 ans, j’ai accompagné mon grand frère qui effectuait un stage d’escrime. Je voulais absolument y participer, j’ai insisté, j’ai pleuré et le directeur m’a accepté, le charme pour ce sport a opéré de suite.
A la fin du stage, le Maître d’armes a été voir ma mère car il pensait que j’avais du potentiel. L’histoire a commencé comme ça et je ne me suis jamais arrêtée. L’escrime est un sport complet, il allie à la fois un aspect technique, tactique et physique mais également un côté mental qui est primordial. Tous ces facteurs m’ont tout de suite donné le goût de l’effort, de la persévérance, du dépassement de soi et surtout de la gagne.
3. Justement, si tu avais dû choisir un autre sport, ce serait lequel ?
Malgré ma taille, sans doute que ça aurait été le tennis car c’est un sport individuel que j’aime beaucoup et qui se pratique en intérieur ou en extérieur contrairement à l’escrime. J’apprécie ce face à face, de jouer contre l’autre avec un esprit de domination et de duel.
J’aime la citation “seul on va plus vite, ensemble on va plus loin” tout en préférant gérer la pression de manière individuelle. En escrime, lorsque l’on tire en équipe, nous avons toutes des rôles bien définis, ce qui m’amène à apprécier le collectif mais sans dépendance.
4. Quel est ton premier souvenir de sport ?
En tant que spectatrice, c’est la Coupe du monde 1998 qui restera sans doute l’un de mes plus beaux souvenirs mais surtout le premier moment d’effervescence autour d’une équipe.
En tant que sportive, c’est mon 1er titre de championne de France Benjamine à l’âge de 12 ans. J’ai compris ce qu’était le sport de haut niveau et c’est ce qui m’a motivé à travailler dur. Ce titre est sans hésitation le déclencheur qui m’a donné envie de rêver plus grand.
5. Quels sont tes meilleurs et pires souvenirs liés à ta carrière sportive ?
Pour les meilleurs, il y en a 3.
D’abord ma 1ère médaille internationale en tant que vice-championne d’Europe par équipe en 2014 chez moi à la maison à Strasbourg devant ma famille.
Ensuite le titre de championne du monde 2018 par équipe parce qu’entre 2014 et 2018, nous avions fait 2e et 3e. Finalement ça a permis de démontrer que nous pouvions gagner.
Et enfin, ma médaille à Tokyo en 2021 car malgré une défaite en finale, lorsque l’on est sur un podium Olympique on prend conscience du travail accompli. Moi qui ai mis du temps à éclore, j’ai connu des galères avec les blessures et en ayant vécu des jeux sans médaille, j’ai pris conscience du chemin parcouru.
Le poids de la médaille qui est autour de 500 grammes, nous le rappelle également. Lorsque Julien Pillet est revenu des JO de Sydney en 2000 avec une médaille d’argent, j’ai eu l’occasion de la toucher, c’est là que je me suis dit “j’en veux une aussi” et je me suis appropriée cette envie.
Mon pire c’est en même temps celui qui m’a le plus aidé, c’est la défaite aux Jeux olympiques de Rio en 2016. Cet échec nous a préparé mentalement pour Tokyo et cette expérience nous a appris à vivre l’instant présent en profitant de chaque moment. Voir les autres performer alors que l’on échoue, ça aide énormément à gérer la pression du jour J. Ce fut très formateur et on mesure l’importance de l’expérience dans la gestion des grands événements avec notamment la préparation à supporter le poids des médias.
6. Si tu devais être un/e autre sportif/ve sportif tricolore, qui choisirais-tu et pourquoi ?
Ce serait Clarisse Agbegnenou pour la femme, la sportive et la future maman qu’elle est. J’ai eu la chance de la voir se préparer en compétition aux Jeux, on a discuté dans la salle d’échauffement comme si nous allions boire un café et 5 minutes après, elle était en mode combat, ça m’a vraiment impressionné.
7. Justement, plus jeune, qui était ton idole, ton exemple ?
En sportive féminine, Serena williams c’est mon modèle qui m’a permis de rêver, de comprendre qu’il n’y avait pas de barrière à se mettre car elle a su casser les stéréotypes liés au corps de la femme. Voir de quelle manière elle s’assume m’a aidé à m’assumer et prouver qu’il est possible d’être performante avec une morphologie différente.
En sportif masculin, étant dans une famille de footballeurs par mes 2 frères, ce serait Zinédine Zidane. J’ai toujours adoré sa technique, sa prestance, sa sérénité et il avait une capacité à se transcender de manière élégante dans les moments importants. Mon sport étant très technique et gracieux, je suis sensible à ce genre de qualités.
Je précise également au passage que je suis une fan inconditionnelle du RC Strasbourg.
8. De quel/le sportif/ve tricolore es-tu le plus proche ? Une anecdote sur elle/lui?
Je suis très proche des judokates car nous nous côtoyons à l’INSEP ou lorsque nous sommes blessés. Pour l’anecdote, j’ai le souvenir de paquitos (Jeu sportif et festif pratiqué dans le sud-ouest de la France, où plusieurs personnes s’assoient par terre l’une derrière l’autre et font des mouvements d’avant en arrière avec leurs bras levés, pour porter une personne au bout de la file) avec les judokas dans le bus en direction de l’avion pour Paris au retour des JO de Tokyo. J’ai également une amie du BMX rencontrée à la semaine Olympique avec qui je suis très proche.
9. Par équité, peux-tu nous livrer une anecdote personnelle ?
A 25 ans, on m’a dit “tu es trop vieille, tu ne fais plus de résultats, si tu ne performes pas sur la prochaine compétition, nous ne pourrons pas te garder”. C’est derrière cette mise sous pression que je fais mon 1er podium international et qui lance ma carrière. J’aime être en confiance mais là ça m’a mis un coup de pied au derrière.
10. Pour finir, que pouvons-nous te souhaiter pour l’avenir ?
J’ai un gros défi cette année pour retrouver mon niveau et remonter au classement car je viens de faire une pause afin de savourer ma médaille olympique. Je suis fraîche mentalement et prête à enchaîner les 2 années pleines à venir avec comme objectif Paris 2024. Vous pouvez me souhaiter d’être double championne Olympique en individuel et en équipe.
Quel est le programme jusqu’à Paris 2024 ?
D’un point de vue logistique, j’aimerais trouver un partenaire qui m’accompagnera pour le dernier grand challenge de ma carrière que représente Paris 2024. Il est plus difficile de trouver un sponsor aujourd’hui vice-Championne Olympique que lorsque je n’avais pas de médaille, ni médiatisation.
Sportivement, j’ai bien soufflé avec une année de transition, je vais monter en puissance sur l’entraînement et le retour à la compétition, ça commencera rapidement avec les championnats de France en Mai 2022.
Quelques dates :
- Date de naissance : 1er Avril 1988
- Chevalier de l’Ordre National du Mérite en 2021
En individuel :
- Médaille de bronze Europe 2016
- Vice Championne d’Europe 2015 en individuel
- 10 médailles en coupe du monde dont 1 victoire au grand prix de Moscou
Par équipe :
- Vice Championne Olympique par équipe Tokyo 2020
- Championne du Monde par équipe 2018
- Vice Championne du monde 2014 et 2019 par équipe
- Médaille de bronze mondial 2017 par équipe
- Vice Championne d’Europe 2014, 2015 et 2016 par équipe
- Médaille de bronze euro 2017, 2018 et 2019
Sportive engagée dans la mixité et le développement du sport féminin, Charlotte est à l’écoute de partenaires qui souhaiteraient l’accompagner dans sa route vers Paris 2024. Rendez-vous sur sa page Instagram pour la contacter !