ITW le Sport et Moi – Isabelle Severino

Championne d’Europe au sol en 2005, la Gymnaste Isabelle Severino nous a fait l’honneur de répondre à notre interview « le Sport et Moi » avec un plein de bonne humeur.

  1. Pour commencer, pourrais-tu te présenter brièvement ?

Isabelle, 40 ans depuis le 9 Avril, anciennement en quarantaine, ancienne Gymnaste de haut niveau avec mes premiers Jeux Olympiques en 1996 à Atlanta. Je suis médaillée de Bronze en 1996 aux championnats du Monde de San Juan (Porto Rico), Championne d’Europe au sol en 2005 et Championne de France en 1995.

Je suis également multiple finaliste aux Championnats du Monde, d’Europe et Vice-Championne du Monde de Gymnastique Aerobic en 2003.

J’occupe actuellement le poste de  directrice administrative et du développement chez OL Ingenierie (société qui n’a aucun rapport avec Jean-Michel Aulas ou l’Olympique Lyonnais), je suis engagée au CNOSF et je fais également des interventions en entreprise, chez SANOFI par exemple, sur les thèmes de l’esprit d’équipe, de la remise en question et du dépassement de soi.

  1. Pourquoi avoir choisi ce sport et pas un autre ?

J’ai débuté très jeune et au départ je faisais plein d’autres sports comme de l’équitation, du tennis, de la danse. Depuis toute petite, je grimpais partout, que ce soit dans la rue ou dans le jardin de mes parents.

Finalement, je suis venue à la gymnastique car je trouvais ce sport très ludique. On y apprend très vite les roulades, on apprend à aller plus vite, à toujours mieux faire pour aboutir à une perfection technique.

Même si la perfection est très présente en gymnastique, il est toujours possible d’y apprendre de nouvelles choses. Il y a toujours des perspectives différentes qui sont à la fois ludiques et acrobatiques. En gym, on a une constatation des progrès qui est très facile à apprécier. Lorsque tu passes une acrobatie sur la poutre, le constat de progression et de réussite est immédiat.

Même s’il s’agit d’un sport très strict qui est lié à sa dangerosité, le côté ludique a toujours été un élément nécessaire dans mon développement. Il est évident que les possibilités de se blesser lors d’une chute sur un exercice de poutre, de barres ou autre nous obligent à beaucoup de rigueur.

  1. Justement, si tu avais dû choisir un autre sport, ce serait lequel ?

Très vite il m’a fallu choisir entre la danse (j’aimais beaucoup reproduire les chorégraphies de Claude François) et la gym. Finalement, avec l’exercice de gym au sol, je pouvais retrouver les sensations de la danse et d’une certaine manière, combiner les 2 sports. Au-delà de ça, j’aurais bien aimé jouer au tennis, c’est un sport que j’apprécie particulièrement.

J’ai été pendant longtemps dans le Top 10 mondial en gymnastique, je me dis que ça aurait pu être également très sympa de faire partie du top 10 mondial au tennis.

  1. Quel est ton premier souvenir de sport ?

Mon premier souvenir c’est en 1988, au moment des Jeux Olympique de Séoul lorsque je vois la gym à la télévision. J’adorais regarder ce côté perfection artistique, j’avais 8 ans et je me disais que je voulais, moi aussi,  être championne olympique. Mon objectif était d’atteindre le haut niveau tout en gardant cette notion de plaisir.

Durant tout mon parcours, j’ai eu la chance d’avoir des parents qui ne m’ont jamais poussée. Pour moi la gymnastique a toujours été une passion. Je pense que si tu n’es pas passionnée, ça ne marche pas.

  1. Quels sont tes meilleurs et pires souvenirs liés à ta carrière sportive ?

Mon meilleur souvenir c’est ma médaille aux Championnats du Monde de 1996 à San Juan (Porto-Rico). Mes parents n’étaient pas toujours présents sur les compétitions mais pour celle-ci, ils avaient pu venir. J’avais seulement 16 ans, c’était au moment de mon anniversaire et le lieu était magnifique, c’est un superbe souvenir.

J’ai un second très bon souvenir, celui d’avoir été dans l’équipe de France qui a contribué au sacre d’Emilie Le Pennec qui est à ce jour, la seule Championne Olympique Française de Gymnastique. C’était en 2004 aux Jeux Olympiques d’Athènes. Avec toute l’équipe nous l’avons beaucoup soutenue afin qu’elle puisse être dans les meilleures conditions. Cette notion de groupe et de résultat par équipe est tellement transcendant, j’en garde également un magnifique souvenir.

En parlant d’équipe, je viens de revoir les images des Championnats du monde de 1995 au Japon lorsque nous qualifions l’équipe de France pour les JO d’Atlanta grâce à notre 6ème place. Il y avait Ludivine Furnon, Cécile Canqueteau, Laetitia Begue, Elvire Teza, Laure Gely et Aurélie Troscon. Nous sommes toutes en train de sourire, ce sont bien évidemment des émotions qui restent. L’avantage avec le concours par équipe, c’est qu’il y a 6 filles avec différents capacités et tout le monde à sa chance.

(A partir de la 55ème minute)

Mon pire moment c’est évidemment ma blessure au tendon d’Achille lors des Championnat d’Europe à Clermont seulement 3 mois avant les jeux de 2008 à Pékin. J’avais déjà effectué 2 agrès et ça m’arrive pendant mon échauffement au sol. Au final, nous terminons à la 3 place par équipe mais ça reste malgré tout un moment difficile. Qui plus est, 3 semaines avant cette compétition, j’avais battu la roumaine Sandra Izbaza qui deviendra quelques mois plus tard Championne Olympique au sol.

Pour rester positive, après cette blessure, j’ai eu l’opportunité d’être recrutée par France TV pour aller commenter les Jeux à Pékin. Cette expérience m’a permis de m’ouvrir à de nouvelles perspectives.

  1. Si tu devais être un/e autre sportif/ve sportif tricolore, qui choisirais-tu et pourquoi ?

Ce serait Virginie Dedieu qui pratique la natation synchronisée. Elle est triple Championne du Monde, médaillée Olympique, multiple Championne d’Europe et de France, je la connais depuis l’âge de 13 ans et c’est l’une de mes athlètes préférées. À 40 ans elle est encore au top, elle n’a jamais changé. Je l’admire pour la personne qu’elle est mais également pour son côté artistique. Mon admiration est d’autant plus grande que je n’aime pas l’eau… (rires)

  1. Justement, plus jeune, qui était ton idole, ton exemple ?

Mon idole c’était Daniela Silivas, une gymnaste magnifique. Quand elle participe aux JO de Seoul en 1988, elle gagne tout avec 3 médailles d’or. Elle est également 7 fois Championne du Monde.

Sinon en 1996, je n’ai que 16 ans et j’ai la chance de rencontrer Marie-José Pérec. Cette femme a une aura énorme, elle est grande, elle est belle, c’est incroyable de la voir.

  1. De quel/le sportif/ve tricolore es-tu le plus proche ? Une anecdote sur elle ?

Emilie Le Pennec, la Championne Olympique qui est aujourd’hui ostéopathe. Nous avons vécu beaucoup de choses ensemble et en grandissant nous ne nous sommes jamais perdues de vue. Je le lui ai déjà dit mais c’est la seule personne que j’ai enviée, pour son titre Olympique….

On a beaucoup discuté de tout ça, on a partagé des moments uniques et forts. On a mis du temps à s’apprécier mais aujourd’hui nous sommes très proches.

Une anecdote sur Emilie ? Elle a de toutes petites mains et pourtant elle est Championne Olympique aux barres asymétriques.

Je reste assez proche des générations entre 1996/2004 et j’ai également échangé avec beaucoup de sportifs Français entre 1996 et 2016. Ce sont souvent les mêmes sujets qui reviennent. Ils sont liés aux difficultés financières ou à l’absence de reconnaissance, uniquement parfois en raison d’un mauvais timing. Par exemple, quand Amélie Mauresmo gagne Wimbledon en 2006, c’est une superbe performance qui pourtant passe quasiment inaperçue en raison de l’équipe de France de Football qui doit disputer le lendemain, la finale de la Coupe du Monde (Cf. une l’équipe du 9 juillet 2006).

  1. Par équité, peux-tu nous livrer une anecdote personnelle, méconnue du grand public ?

J’ai fait un championnat du monde en 2005 en Australie, je fais la finale avec 20 000 personnes qui me regardent  et je suis seule aux barres asymétriques. Là je fais 2 chutes, je glisse mais comment expliquer que je tombe sur le dos pour finir en toupie comme une tortue. Yann Cucherat qui est à Lyon, me l’a repassé récemment pour se moquer de moi. Sur le moment c’était assez humiliant mais aujourd’hui j’en rigole.

  1. Pour finir, que pouvons-nous te souhaiter pour l’avenir ?

Me fêter et me souhaiter de pouvoir fêter mes de 40 ans avec mes amis ainsi qu’un bon déconfinement. Le sport m’a apporté énormément et j’aimerais que Paris 2024 puisse apporter autant aux gens que ce qu’il a pu m’apporter.

Question bonus : Quelle est pour toi la meilleure gymnaste de l’histoire ?

Une seule c’est impossible alors je dirais pour être complète :

Daniela Silivas, la Roumaine, pour sa perfection, sa beauté artistique, elle m’a inspiré

Lilia Podkopayeva, l’Ukrainienne, pour sa finesse et son petit gabarit

Henrietta Ónodi, la Hongroise, tellement forte techniquement.

Quelques dates :

  • Date de naissance : 9 Avril 1980
  • 1996 : Médaille de Bronze aux Championnats du Monde de San Juan
  • 2004 : 6ème au JO d’Athènes
  • 2005 : Championne d’Europe au sol à Debrecen
  • 2008 : Médaille de bronze aux Championnats d’Europe à Clermont-Ferrand (Concours général par équipes)
  • Egalement Finaliste aux Championnats du monde en 1997, 2006 et 2007